A la tête de l’Agence de l’Informatique de l’Etat (ADIE) depuis six années, Cheikh Bakhoum a des ambitions politiques à Grand Yoff dont il veut être le maire. Il revient, dans cet entretien, sur les défis qu’il compte relever dans son fief politique ainsi que ses réalisations à la tête de l’ADIE.
Entretien réalisé par Babacar DIONE
Vous êtes candidat à la mairie de Grand-Yoff pour les prochaines élections locales ; avez-vous le soutien de vos camarades de parti et de Benno Bokk Yakaar de la localité ?
Je ne dirais pas les choses ainsi. J’ai plutôt manifesté mon intérêt pour Grand-Yoff. Ce que je n’ai jamais caché d’ailleurs. Mais je suis conscient que nous sommes dans une large coalition qui, au moment venu, va se concerter afin de mettre en place la meilleure stratégie pour l’emporter. Car c’est ce qui compte. Donc quelles que soient nos divergences, nous avons tous en ligne de mire la victoire et devrons donc mettre en place un projet, une alternative crédible. En définitive, ce que nous voulons, c’est que notre coalition Benno Bokk Yaakaar gagne la municipalité de Grand-Yoff et qu’enfin l’alternance s’opère dans cette commune qui nous est chère et qui mérite mieux que l’actuel maire et sa clique. C’est tout ce qui nous intéresse. Et pour y arriver, il faut que toutes les forces de notre coalition se rassemblent autour de l’essentiel. Mais nous avons bon espoir car force est de reconnaitre que, ces dernières années, notre dynamique s’est accélérée avec des militants de l’opposition qui ont rejoint nos rangs, des camarades de parti et des alliés de Benno Bokk Yakaar qui cherchent à s’unir davantage pour travailler ensemble avec nos forces et nos moyens respectifs pour la victoire à Grand-Yoff.
Quels sont les défis que vous comptez relever ?
Nous voulons mettre en place dans le cadre de la coalition Benno Bokk Yakaar, un projet alternatif face à ce que l’actuelle équipe municipale est en train de faire et qui n’est, de toute évidence, pas à la hauteur des enjeux de la situation dans les 66 quartiers de Grand Yoff. Avec le budget actuel de 2 milliards que nous comptons augmenter considérablement à travers une meilleure gestion des recettes si les Grandyoffois nous accordent leur confiance, nous allons changer radicalement le cadre de vie dans la commune en le rendant agréable, accompagner les établissements scolaires aussi avec un programme d’assainissement et d’hygiène.
Il s’agira aussi d’aller encore plus loin dans la sécurisation de la commune en complétant ce que l’Etat a entamé, à travers l’ADIE que je dirige, avec des caméras de surveillance installées dans différentes artères de la ville de Dakar dans le cadre du programme « Safe City » (ville sûre). La mairie peut aller dans le même sens avec plus de proximité en installant des dispositifs de vidéosurveillance au niveau des points stratégiques de la commune pour lutter contre la criminalité à Grand-Yoff. L’autre élément qui pourra aider à lutter contre la criminalité dans la commune, c’est l’emploi des jeunes qui sera une priorité dans notre action en tant que maire. Une cartographie des profils de jeunes résidant dans la commune sera faite de prime abord, un encadrement intelligent leur sera apporté ensuite à travers des programmes qui leur permettront de s’insérer dans la vie active avec en partie l’accompagnement des structures de l’Etat comme la DER, le FONGIP, 3FPT…
En 2014, il a fallu que le Président Macky Sall tranche pour qu’Adama Faye laisse la place à Mimi Touré candidate de la coalition. Ce dernier pourrait-il être un obstacle pour vous ?
2014, c’est déjà très loin derrière nous. Je pense que les différentes joutes électorales qui se sont déroulées, depuis, nous ont montré quelque chose de très simple : pour gagner une élection dans une localité, de surcroît considérée à tort ou à raison comme la chasse gardée de l’opposition, il faut travailler main dans la main et en bonne intelligence en taisant toutes nos divergences. Nous avons beaucoup évolué dans ce sens. Adama Faye, comme tous les autres leaders de la mouvance présidentielle dans la commune sont des atouts et non des obstacles dans la mesure où nous sommes tous conscients que ce qui importe, c’est de faire basculer Grand-Yoff dans notre camp afin de soulager sa population qui subit au quotidien les affres de la mauvaise gestion de l’actuelle équipe municipale.
Le vote affectif est une réalité au Sénégal, et Khalifa Sall semble bien ancré dans les cœurs des habitants de Grand Yoff. Comment comptez-vous renverser cette tendance ?
Si vote affectif il y a, c’est nous qui en profiterons parce que la tendance est déjà renversée. Nous y avons travaillé pendant 13 ans et aujourd’hui nous commençons à en récolter les fruits. Nous avons été patients et pédagogiques avec les Grandyoffois et en tant que citoyens avertis et électoralement mûrs, ils ont commencé à bien nous le rendre. Notre travail acharné sur le terrain et pas seulement en période électorale et les résultats dans la commune lors des derniers rendez-vous électoraux nous ont montré que nous avons presque fini d’être ancré dans les cœurs des habitants de Grand-Yoff, pour reprendre votre expression. Ce que nous espérons maintenant, c’est que cette complicité naissante, cet estime et ce respect mutuels atteindront leur apogée lors de la prochaine élection municipale afin de nous permettre de nous installer dans le fauteuil de maire et de servir Grand-Yoff et ses dignes fils.
«A l’ADIE, ces six dernières années, nous avons pu mener une mission exaltante »
Vous dirigez l’Adie depuis six longues années, chose rare dans le champ politique. Qu’est ce qui explique cette longévité ?
La confiance du Chef de l’Etat. À qui d’ailleurs nous renouvelons nos remerciements pour nous avoir donné l’opportunité de servir notre pays à travers l’ADIE qui est un élément essentiel dans la transformation digitale de l’administration sénégalaise parce que nous savons à quel point le Président Macky Sall compte sur le numérique dans la Stratégie de développement de notre pays. Ces six dernières années, nous avons pu mener une mission exaltante en ayant relevé beaucoup de défis.
Quel est, aujourd’hui, l’impact de votre mission dans les politiques publiques, notamment sur la gouvernance numérique ?
Cet impact est multiple et touche tout le périmètre de notre action. Sur la digitalisation des procédures administratives, nous avons créé un outil que nous appelons ‘’TeleDac’’ qui permet de digitaliser et de délivrer une télé-procédure prête à être opérationnelle en un temps record si un ministère nous sollicite. Nous l’avons déjà fait avec beaucoup d’administrations et de structures sur une cinquantaine de procédures au niveau de l’Etat, au bénéfice de nos concitoyens.
Pour ce qui est de la fibre optique, nous sommes présents dans les 45 départements du Sénégal. Ce qui n’est pas le cas pour beaucoup d’opérateurs pour des raisons de non-rentabilité. Mais grâce à ces installations, les Sénégalais peuvent disposer du haut débit où qu’ils soient à travers le pays.
Je peux ajouter aussi que depuis l’avènement de la Covid-19, l’ADIE est sollicitée plus que d’habitude par les administrations pour continuer à fonctionner, à échanger au sein de l’Administration, à communiquer avec le public, les usagers de l’Administration. Jusqu’au plus haut sommet de l’Etat, les infrastructures de l’ADIE ont été utilisées, notamment pour l’organisation du conseil des ministres.
Smart Sénégal en est aussi un exemple avec ces cinq volets à savoir « Safe City », « Smart Territoires », « Villes sans fil, « Smart Education » et « Câble sous-marin » qui permettront de mettre les TIC dans les programmes nationaux de développement socio-économique et de connecter le Sénégal, les Sénégalais et les administrations.
In fine, C’est une équipe dévouée autour du Directeur général qui a fait de l’ADIE ce qu’elle est devenue aujourd’hui, c’est-à-dire une agence qui a fini de mailler le territoire en termes d’infrastructures numériques et d’innovations technologiques dans toutes les administrations et leurs démembrements à travers les 45 départements du pays.
Quel rôle peut jouer le développement du numérique dans la résolution du chômage au Sénégal ?
Nombreux sont les jeunes et start-ups qui au quotidien tentent d’apporter des solutions aux questions qui touchent divers secteurs d’activité. Et justement c’est la raison pour laquelle l’Etat a mis en place des infrastructures et des instruments pour optimiser les opportunités et les emplois dans le secteur du numérique. Il suffit maintenant de développer davantage le contenu local pour booster l’employabilité. Les chiffres des spécialistes comme l’incubateur CETIC montrent, par exemple, que c’est au niveau des TIC que l’entreprenariat des jeunes s’accélère le plus. Cette tendance va aller crescendo et c’est une bonne chose.
Le programme Smart Sénégal au même titre que les grands projets numériques aussi bien publics que privés aideront à mieux accompagner les jeunes et à garantir la pérennité des start-ups, ce qui contribuerait naturellement à la résorption du chômage surtout au niveau des jeunes.
À l’ADIE, nous avons beaucoup d’autres initiatives pour encourager la formation des jeunes au numérique, et accentuer la sensibilisation. Aussi en développant le numérique dans l’administration et dans nos territoires, nous créons un environnement propice à l’entreprenariat dans le secteur des TIC et luttons clairement à long terme contre le chômage de manière efficiente.