Le Sénégal commémore aujourd’hui la 22e année du naufrage du bateau Le Joola. Un drame dont la plaie est béante. Les familles toujours en quête de justice fondent leurs espoirs sur le nouveau gouvernement qui prône la rupture.
Par Adji Ousseynou DIOP DIALLO
Lamine Mbengue est l’un des enfants que le naufrage du Joola a rendu orphelin. Il était loin d’imaginer qu’il ne reverra plus son père lorsqu’il partait en vacances à Kébémer.
Devenu adulte aujourd’hui, il n’arrive toujours pas à faire le deuil. Selon lui, si les familles n’arrivent toujours pas à oublier, c’est de la faute de l’État du Sénégal qu’il accuse de négligence. Malgré son jeune âge quand le drame s’est produit, il garde toujours en tête les souvenirs. « Je venais juste d’avoir 9 ans. J’étais parti en vacance à Kébémer et je suis revenu à Dakar le 26 septembre à 20 heures. Dès le lendemain, ma mère m’a envoyé acheter du pain. À mon retour j’ai vu que la maison est remplie de monde avec des visages très tristes . Lorsque j’ai demandé qu’est ce qui se passe ? On m’a fait savoir que le bateau est chaviré », raconte-t-il. « Sur le coup, pour moi, ce n’était pas grave. Étant jeune, je pensais que mon père était un héros, il ne pouvait pas partir comme ça. J’étais confiant que mon père va revenir. Mais au fur et à mesure les années passent, j’ai grandi, j’ai compris maintenant ce qui s’est passé réellement. On a eu la chance de maîtriser un peu le dossier du « Joola » mais nous avons le cœur meurtri. Personnellement j’ai le sentiment que l’État du Sénégal à sacrifié nos parents. Parce qu’ils savaient que le bateau n’était pas apte à voyager. Pourquoi ils ont laissé les gens embarquer avec d’énormes risques ? C’est ça la véritable question », dit Lamine Mbengue, amer également membre du Comité d’initiative pour l’érection mémorial musée du Joola. Le cœur rempli d’émotions, M. Mbengue lâche : « l’État du Sénégal a sacrifié nos parents ! Et il est temps que l’État corrige cette injustice qui dure depuis 22 ans », plaide Lamine Mbengue.
Cependant, il a espoir que le nouveau régime va faire la rupture. « Nous attendons juste du nouveau régime que les revendications que nous avons déposé depuis 2007 sur la table du gouvernement soit satisfaites et que justice se fasse la justice.
Leur seule satisfaction reste, à ce jour, le Mémorial-Musée qui a été construit à Ziguinchor. « Le ministre des sports et de la culture a annoncé le démarrage des activités du musée de mémorial à Ziguinchor et c’est une bonne nouvelle ! Cependant, les familles des victimes. Le seul hic c’est que les familles des victimes ont été exclues de la commission scientifique pour des raisons que nous ignorons et c’est une injustice. À l’époque le ministre avait demandé d’écrire une demande pour qu’on soit réintégré dans la commission mais jusque-là, il n’y a pas de réponse. Aujourd’hui l’État démarre les activités mais, sur le contenu, il ne partage pas avec les familles des victimes. Nous avons jugé que le musée soit un endroit où on doit se souvenir des disparus », dixit Lamine Mbengue.
Malang Badji est un rescapé du Joola et victime, un sentiment de tristesse et de consternation l’anime. Les années passent mais les mauvais souvenirs restent. « Un sentiment de tristesse. Parce que perdre un être cher est une chose mais, le perdre de cette manière en est une autre. J’ai perdu 27 personnes, parents, proche et amis », confie-t-il.
Le sieur Badji attend de ce nouveau régime qu’il soit plus regardant envers les situations et préoccupations des rescapés et des familles des victimes par apport aux engagements que les régimes précédents ont pris. Puisqu’on dit que l’État est une continuité », dit-il. « Pour une première fois un premier ministre vient présider la commémoration du naufrage du Joola. Si mes souvenirs sont bons », se réjouit-il.
Pour rappel, le bateau le Joola qui assurait la navette entre Ziguinchor et Dakar chavirait dans la nuit du 26 au 27 septembre 2002, au large des côtes gambiennes emportant avec lui plus de 1863 personnes officiellement enregistrées. En cette nuit tragique, le bateau le Joola qui affectait une de ses rotations habituelles, était surchargé, car convoyant plus qu’il en est capable.
