L’élection de Sidi Ould Tah, candidat mauritanien, à la présidence de la Banque Africaine de Développement (BAD), le 29 mai 2025 à Abidjan, a relégué le Sénégalais Amadou Hott à la troisième place avec seulement 3,55 % des voix.
Dans une déclaration publiée hier, l’ancienne députée Adji Diarra Mergane Kanouté, ancienne vice-présidente de l’Union Interparlementaire (UIP) et secrétaire générale de l’Union pour le Développement du Sénégal (UDS/A), voit dans cette défaite un symptôme d’un « recul diplomatique » du Sénégal sur la scène continentale et internationale, un phénomène qui s’inscrit dans une série de revers ces dernières années.
Adji Mergane Kanouté ne mâche pas ses mots. Selon elle, l’échec d’Amadou Hott, malgré ses compétences reconnues, n’est pas un cas isolé. Elle évoque sa propre expérience en 2023, lorsqu’elle a perdu la présidence de l’UIP face à la Tanzanienne Tulia Ackson, malgré son statut de vice-présidente sortante et un profil plus expérimenté que ses concurrentes est-africaines. « La proximité géographique des trois femmes de l’Afrique de l’Est a été mise en avant », regrette-t-elle, pointant un manque de mobilisation diplomatique des autorités sénégalaises de l’époque.
Elle cite également d’autres exemples marquants. En août 2024, le Dr Ibrahima Socé Fall a échoué à devenir directeur de la région Afrique de l’OMS, devancé par un autre Tanzanien, le Dr Faustine Englebert Ndugulile, lors de la 74e session du Comité régional à Brazzaville. En 2017, Abdoulaye Bathily, pourtant candidat unique de la CEDEAO pour la présidence de la Commission de l’Union Africaine, a été battu par le Tchadien Moussa Faki Mahamat, faute d’un soutien suffisant au sein de la sous-région. « Bathily n’avait pas fait le plein de voix au niveau des pays de la CEDEAO », rappelle Kanouté, dénonçant un manque de solidarité régionale.
Un lobbying faible
Pour Adji Diarra Mergane Kanouté, ces échecs successifs ne reflètent pas un déficit de compétences des cadres sénégalais, mais plutôt une stratégie diplomatique défaillante. « Le lobbying de l’État du Sénégal auprès des voisins d’abord, mais aussi des autres régions, ne semble plus assez agressif ni diversifié », déplore-t-elle. Elle appelle à une approche plus proactive et inclusive, capable de mieux intégrer les jeux d’influence au sein des organisations continentales et internationales. Selon elle, les autorités doivent tirer les leçons de ces revers et s’ouvrir davantage à d’autres régions du monde pour renforcer leur positionnement.
Bien que cet échec à la BAD survienne un an après l’arrivée au pouvoir du Président Bassirou Diomaye Faye et de son Premier ministre Ousmane Sonko, Kanouté ne l’attribue pas directement à leur politique. Elle y voit plutôt une tendance de fond, amorcée sous les gouvernements précédents. Cependant, elle interpelle le régime actuel sur la nécessité de redynamiser la diplomatie sénégalaise. « La nouvelle préséance de ‘l’Intégration africaine’ devant les ‘Affaires étrangères’ doit produire ses effets au sein du continent d’abord », insiste-t-elle.
Avec seneweb
