De l’Ordure à l’Or dur, un film documentaire sur la lutte des récupératrices-eur-s de déchets pour une transition juste, réalisé par Rosalind Fredericks, professeur géographie et des études africaines New York université, aux États-Unis a été projeté en avant-première à l’Institut français de Dakar. Ce film est une immersion dans la décharge de Mbeubeuss, qui lève un coin du voile sur le mythe qui entoure ce lieu ainsi que le quotidien de ces travailleurs dont les emplois sont menacés par le projet de restructuration de la décharge.
Par Adji Ousseynou DIOP DIALLO
Un Chef d’œuvre, un outil didactique et surtout un plaidoyer fort pour la cause des récupérateurs, c’est tout ce que représente le film documentaire réalisé par Dr Rosalind Fredericks, professeur de géographie et des études africaines New York université, aux États-Unis. « De l’Ordure à l’Or Dur » révèle au public la vie des récupérateurs de Mbeubeuss, leur lutte pour accéder à la formalisation, mais surtout leur désarroi face à la menace qui plane sur leurs emplois depuis le lancement du projet de modernisation de la décharge de Mbeubeuss. À travers un voyage au sein de la décharge les récupérateurs se racontent faisant passer les spectateurs par toutes les émotions.
Il a fallu trois ans pour réaliser ce chef-d’œuvre. « Depuis 2002, je mène les recherches sur le secteur de nettoiement à Dakar ». Elle a entamé ses recherches à Mbeubeuss 2016, notamment sur le secteur informel, la récupération et le recyclage. « ‘était C’est durant ma collaboration avec les récupérateurs qu’on a pensé à faire un film pour accéder à une plus grande audience et souligner la complexité de la situation de Mbeubeuss et montrer la valeur de la récupération des récupérateurs et des recycleurs à Mbeubeuss », explique Dr Fredericks.
Dans la partie plaidoyer les acteurs veulent accéder à une plus grande audience « pour essayer de changer l’avenir de Mbeubeuss, essayer de changer la politique du projet qui est en train de se passer à Mbeubeuss », confie la réalisatrice.
Au-delà des conditions de travail des récupérateurs, ce film restaure leur dignité en tant que travailleurs, mais constitue également un outil de plaidoyer pour une transition juste. En effet, les travailleurs de la décharge de Mbeubeuss, malgré leur adhésion au programme de modernisation et de gestion des déchets (PROMOGED), se sentent menacés.
« L’Etat a mis en place un projet dénommé PROMOGED lancé en 2021, on sait qu’en toute responsabilité que ce projet nous affecte. Nous sommes conscients que la décharge ne peut pas continuer à évoluer de la même manière qu’auparavant. Mais un tel projet, s’il est initié devrait prendre les acteurs qui évoluent sur cette décharge. Mais depuis que ce projet existe, les récupérateurs n’ ont plus ce qu’ils avaient auparavant. Mais le nouvel Etat devait diagnostiquer les manquements du projet mais ne l’a pas fait et choisit d’ accélérer le processus. Ce qui va causer des pertes d’emplois », regrette Arona Niasse, président de l’ Association des récupérateurs de la décharge de Mbeubeuss
Arouna Niasse révèle que Mbeubeuss à 3 milles et quelques récupérateurs qui y travaillent. Chaque récupérateur est soutien de famille.
« Nous craignons la perte de nos emplois. Effectivement cela va se passer ainsi s’ils optent pour la dynamique déjà annoncée. Je pense que si nous privilégions le dialogue, des solutions seront trouvées. Nous avons créé notre société de coopérative en 2021 pour jouer activement dans la gestion des déchets c’est le rôle de l’ État d’inclure la société de coopérative dans le système de gestion des déchets », a-t-il déclaré
D’après lui, si aujourd’hui si les récupérateurs n’ étaient pas à Mbeubeuss pour faire des récupérations autour des ordures, les vendre et créer une économie les trois communes autour de Mbeubeuss tel Keur Massar, Malika et Tivaouane Peulh n’ auraient pas existé aujourd’hui. Le travail des récupérateurs est essentiel. Et l’Etat doit se préoccuper du sort des récupérateurs.
« Moi, je pense que les nouveaux dirigeants ont comme slogan le Jub-jubal-jubanti, donc un tel projet à coup de 240 et quelques six milliards donc si vous trouvez des problèmes il faut essayer de résoudre ces problèmes. Mais essayer d’accélérer la cadence, ceci peut amener beaucoup de problèmes. Le film permet de faire connaître ce que les récupérateurs représentent dans ce pays. Ça permet d’édifier ceux qui n’avaient aucune connaissance sur ces récupérateurs. Le regard négatif porté sur ces récupérateurs va changer une fois qu’on finisse de regarder ce film ainsi que de comprendre leur travail. C’est notre gagne pain. Aujourd’hui nous sommes en train de protéger l’environnement. Parce que qu’est ce qu’on dit aujourd’hui que Dieu est une bombe écologique mais c’est une source de vie », a expliqué le président de l’ Association des récupérateurs de la décharge de Mbeubeuss
Il poursuit que « c’est très regrettable et actuellement nous pensons à notre santé. Il faut savoir que il y a aucun de nos dirigeants ou bien de l’État qui nous a promis quelque chose, C’est à nous de prendre soin notre propre santé avec notre coopérative et notre association. Mais c’est sûr, vous savez que dans tout ce qu’on fait et si on n’est pas impliqué là dessus ça cause problème. Et la transition qu’on dise ça doit être une transition juste. Mais telle n’est pas le cas, actuellement si vous allez à la décharge de Mbeubeuss tout le monde est inquiet par rapport à ce projet », fulmine-t-il
Arouna Niasse précise que ce film vient à son heure parce que les récupérateurs traversent une période très difficile concernant le projet Promoged. Et estime que ce film met en face du monde que les récupérateurs sont utiles dans cette société.
« Vous savez avec le projet PROMSED pour réhabiliter la décharge de Mbeubeuss, on n’ est pas contre le projet Promoged mais c’est un projet qui ne rassure pas. Et c’est un projet qui a amené beaucoup d’inquiétudes au sein des récupérateurs. Et moi, je pense avec l’État actuel, ils vont penser à autre chose que détruire ces milliers de travailleurs qui sont des soutiens de famille. Donc moi aussi à mon avis l’Etat à la responsabilité de garantir les moyens de subsistance des récupérateurs comme le projet l’indique. Nous avons beaucoup d’alternatives parce qu’une association qui est née depuis 1994 et qui travaillent dans cette décharge depuis très longtemps et qui a mis une société de coopérative, la société de coopérative qu’on a mis en place c’est pour qu’on puisse jouer notre rôle effectivement dans le système de gestion des déchets », a-t-il déclaré
Ce dernier appelle à une transition juste et exhorte les autorités à engager davantage leur considération.
