Au Sénégal, les gargotes constituent une véritable problématique pour la sécurité sanitaire des aliments : Elles sont des lieux de transmission de plusieurs germes pouvant entraîner de graves maladies. Ce qui fait d’elles, une véritable bombe à retardement pour les usagers qui les fréquentent.
Par Idrissa NIASSY
Les gargotes, des Établissement qui reçoivent du public (Erp), constituent une véritable bombe à retardement pour les usagers ne disposant pas assez de moyens pour se procurer de la bonne nourriture. En effet, elles sont devenues des lieux de rencontre où l’insalubrité, l’étroitesse des lieux, mais aussi le manque d’hygiène, peuvent entraîner la présence de germes, de microbes pouvant entraîner à leur tour d’innombrables maladies, comme le choléra, la tuberculose et les intoxications alimentaires.
Il est aussi constaté dans les gargotes de nombreuses inattentions, par insouciance et par manque de moyen de travail, pouvant affecter le côté hygiénique du métier de restauration. Selon le capitaine Armand Seck, Chef de la Brigade régionale d’hygiène de Thiès, on peut très bien se passer de ces maladies en faisant quelques gestes de prévention et d’application de l’hygiène dans les gargotes. En quoi faisant ? En la maintenant au propre et l’endroit de préparation des aliments bien rangés. Car, dans plusieurs gargotes les conditions d’hygiène ne sont pas réunies. « Il s’agit aussi d’utiliser plusieurs récipients (3 au maximum) pour laver et rincer les ustensiles et changer très souvent l’eau », a-t-il déclaré. Selon lui, pour maintenir la gargote dans de bonnes conditions d’hygiène, elle doit se trouver dans un local lavable et propre, avec des balais et des poubelles où mettre les déchets et ordures, et les restes d’aliments qui peuvent encore servir, dans le cadre de la fabrication de composites, ou d’aliments de bétails.
Il s’exprimait lors d’une excursion à la gare routière de Thiès et ses alentours pour constater de visu le comportement des gargotiers et autres commerces d’aliments. Cette visite entre dans le cadre de l’atelier de renforcement de capacités des professionnels des médias sur la Sécurité sanitaire des aliments (Ssa) organisé par la Fao (du 16 au 20 juin à Thiès), en partenariat avec l’Ajspd. L’objectif général est de renforcer les capacités des professionnels des médias sur les enjeux, cadres juridiques, outils techniques et bonnes pratiques liés à la sécurité sanitaire des aliments.
Concernant qui doit tenir ou gérer une gargote, ce dernier de faire savoir que : « toute personne qui travaille dans une gargote, ou un établissement qui reçoit du public, doit d’abord faire une visite médicale d’aptitude à la manipulation et à la vente des denrées alimentaires». En grosso modo, une personne saine. «La personne qui manipule ce qu’elle vend, doit être systématiquement apte», a-t-il précisé.
Environnement de vente confortable
Il a fait part, par ailleurs, que l’environnement de vente doit être confortable par rapport à la réglementation sénégalaise pour éviter certaines pratiques. Car, dans la gare routière de Thiès on voit des salons de coiffure pour homme qui côtoient les gargotes. Pour lui, l’aliment doit être forcément apte, tout en étant de qualité et en quantité suffisante. Même l’eau utilisée par les gargotiers doivent faire l’objet d’une visite intense pour mesurer la qualité de potabilité, ainsi que la garde des déchets.
Une gargotière qui a préféré garder l’anonymat, explique que les conditions pour une bonne restauration ne sont pas réunies, du fait de l’étroitesse de la place. Parce que tout se fait dans une seule pièce ; la cuisson, la vente, mais aussi le manger. Ce qui montre qu’il y a un problème d’espace par rapport surtout à la gestion de la sécurité du client. Il a profité de cette occasion pour conseiller la dame d’essayer de voir comment améliorer le dispositif afin de séparer la zone de cuisson et le réfectoire pouvant permettre aux clients d’avoir plus de commodité par rapport à leur santé publique. Même son de cloche chez les vendeurs de « pousse-pousse » envahis par la rouille. Pour éviter que cela crée des problèmes aux clients, ils plaident pour leur changement en matériel composé de nickel.
S’agissant des contrôles dans les maisons, Capitaine Seck de préciser : « nos entrées dans les maisons consistent à faire la prévention, parce que dans notre domaine, on s’occupe de tout ce qui est promotion et prévention de la santé ». « Ce qui fait qu’on ne peut pas attendre jusqu’à ce qu’il y ait un problème dans la maison pour ensuite intervenir », ajoute-t-il. Selon lui, chaque jour, il y a un nombre de visites à domicile que doivent faire les agents du service d’hygiène. «Chaque agent doit faire au minimum 15 visites à domicile par jour, avant de venir présenter la situation trouvées dans ces domiciles», explique-t-il.
Des sanctions pour les personnes qui ne respectent les normes
Pour les restaurateurs qui ne respectent pas les normes de sécurité sanitaire des aliments, le Chef régional de la Brigade d’hygiène de Thiès de déclarer : « des sanctions sont prévues en fonction des infractions ». « Si c’est un problème lié à la mauvaise gestion des eaux usées, là, ça peut même aller jusqu’à 200 000 F Cfa d’amendes, voire même 1 à 2 ans de prison, selon la réglementation », précise-t-il. Parce que, explique-t-il, « l’article L17 voudrait quand même que toute personne qui produit des déchets, surtout les déchets liquides, doit systématiquement mettre un dispositif de gestion de ces déchets, conforme à la réglementation en vigueur». Parce que, ajoute-t-il, la non-conformité par rapport à l’élimination des matières usées liquides est «une infraction délictuelle». Raison pour laquelle, les populations doivent être sensibilisées sur ce qu’elles mangent dans la rue, surtout l’utilisation des papiers cimentés pour servir des repas ou pour faire des pâtes. Parce que, rien que le ciment qui a des composés chimiques peut créer des problèmes.
Revoir les bonnes pratiques d’hygiène
Prenant la parole lors de la visite de terrain, Dr Mamadou Ndiaye, vétérinaire spécialiste en sécurité sanitaire des aliments au bureau sous-régional pour l’Afrique de l’Ouest de la Fao au Sénégal, appelle à revoir les bonnes pratiques d’hygiène. Parce que, pour lui, un restaurant et un salon de coiffure ne peuvent pas être ensemble. «Ce sont deux activités qu’il faut séparer au lieu de les mettre ensemble», a-t-il plaidé. «Les bonnes pratiques d’hygiène, c’est d’abord le site même où on doit implanter une activité de production, de consommation d’aliments, ce qui est extrêmement important. Mais l’environnement de ce site doit être de sorte à ne pas favoriser la contamination», ajoute-t-il. Car, avec les marmites qui sont ouvertes, des éléments étrangers peuvent quitter le salon de coiffure pour aller dans la cuisine, ce qui est problématique. Il est revenu également sur l’état des marmites qui sont mal entretenues. «Dans les pays voisins, vous verrez que les marmites sont complètement blanches. Mais culturellement, au Sénégal, je ne sais pas pourquoi, la plupart des marmites ne sont pas bien lavées», a-t-il déploré. Avant d’appeler l’autorité à intervenir pour séparer les différentes zones. «Nous devons mettre en place des zones pour l’alimentation, des zones pour le commerce et d’autres produits. Mais on ne peut pas mélanger les zones de consommation d’aliments avec certaines activités», a-t-il conclu.