Le président Donald Trump va entamer ce mercredi 9 juillet 2025, un mini-sommet avec cinq chefs d’État africains, notamment ceux du Sénégal, de la Mauritanie, de la Guinée-Bissau, de la Sierra Leone et du Gabon. Quel est l’opportunité de cette rencontre dans un contexte où le Président américain a complètement revu la politique étrangère.
Ibrahima DIOP
Un article publié sur le site farafinanews, plusieurs signes montrent que la rencontre entre le Président Donald Trump et les cinq pays africains n’est pas un simple échange de courtoisie. « La sélection ciblée de ces pays, leur position géographique, leurs régimes politiques récents ou en transition, ainsi que leur potentiel énergétique ou diplomatique, indiquent une démarche intentionnelle, fondée sur un calcul stratégique », relève l’article publié ce 8 juillet. Il fait remarquer que cette rencontre intervient également à un moment charnière des relations internationales : les BRICS se consolident, le conflit israélo-palestinien s’aggrave, et les États-Unis cherchent à repositionner leur influence sur le continent africain.
« Pour le Sénégal, cette rencontre ne doit pas être abordée comme une audience classique mais comme un moment de bascule où il faut, à la fois, comprendre ce qui est réellement en jeu et savoir extraire les dividendes possibles sans compromettre ses positions historiques, sa souveraineté ou sa stabilité interne », préconise l’auteur du texte.
Un intérêt américain certain pour le golfe de Guinée
Selon la même source, l’analyse géographique des pays invités montre une cohérence régionale stratégique : Mauritanie, Sénégal, Guinée-Bissau et Sierra Leone forment un bloc côtier ouest-africain continu, avec une façade atlantique longue, des régimes modérés, souvent fragiles ou en recomposition, tous situés dans une zone riche en ressources (halieutiques, minières, pétrolières, gazières) et encore peu militarisée.
« Le Gabon, bien que géographiquement éloigné des quatre autres, complète cet arc comme point d’ancrage dans le Golfe de Guinée, zone hautement stratégique pour les flux énergétiques mondiaux », souligne l’auteur du texte.
Il ressort de son analyse que le sommet s’inscrit aussi dans une dynamique de grande confrontation géopolitique. « Les États-Unis, et plus encore Donald Trump, perçoivent la présence croissante de la Chine et de la Russie en Afrique comme une menace directe à leurs intérêts économiques et diplomatiques. Pékin investit massivement dans les infrastructures africaines, tandis que Moscou développe des partenariats sécuritaires et militaires avec des régimes en rupture avec l’Occident », explique-t-on dans l’article.
« En recevant cinq chefs d’État africains choisis avec soin, Trump cherche à repositionner l’Amérique comme un acteur de premier plan sur le continent, non plus à travers de grandes initiatives multilatérales comme l’AGOA ou Power Africa, mais par des alliances ciblées, pragmatiques, centrées sur les intérêts immédiats », explique-t-on dans le texte. Selon la source, le Sénégal peut tirer profit de cette logique, mais à condition de ne pas se laisser instrumentaliser dans une guerre d’influence. « Il lui revient d’affirmer sa souveraineté, tout en acceptant les opportunités économiques qui peuvent émerger d’un nouveau partenariat équilibré avec les États-Unis. Mais il ne s’agit pas non plus de rejeter tout partenariat avec les États-Unis.
Ce sommet peut, au contraire, être une occasion historique pour le Sénégal de transformer la relation avec Washington en une relation stratégique à forte valeur ajoutée. D’abord sur le plan énergétique : le Sénégal partage avec la Mauritanie un champ gazier stratégique (GTA – Grand Tortue Ahmeyim), opéré aujourd’hui par des compagnies étrangères, notamment BP et Kosmos.
Dans le nouveau contexte géopolitique mondial et compte tenu de la montée de la demande en gaz naturel liquéfié (GNL), le Sénégal pourrait ; en accord avec la Mauritanie, poser intelligemment ce dossier sur la table. Si les États-Unis veulent renforcer leur ancrage énergétique en Afrique, ils doivent accepter de le faire à des conditions plus équilibrées, plus transparentes, et plus bénéfiques pour les populations locales.
« Le Sénégal, en lien étroit avec la Mauritanie, peut formuler une proposition de renégociation ou de repositionnement des intérêts américains dans le secteur gazier, dans une logique gagnant-gagnant. Ensuite, sur le plan pétrolier : le Sénégal peut également profiter de cette rencontre pour évoquer la situation de ses contrats avec des entreprises comme Woodside (australienne), opérant dans le champ pétrolier offshore de Sangomar. Le moment est propice à une révision partielle des clauses, à l’introduction d’un mécanisme de suivi indépendant, voire à l’entrée d’opérateurs américains sous condition de transparence et de responsabilité environnementale et sociale », a laissé entendre la source.
Selon elle, le pays pourrait, en contrepartie, bénéficier de transferts de technologie, de financements pour la transformation locale des hydrocarbures, ou d’une plateforme conjointe de formation technique des ingénieurs africains dans les métiers de l’énergie.
« Le Sénégal doit donc se rendre à ce sommet avec une extrême vigilance », préconise la source qui rajoute qu’il ne doit pas se déplacer pour recevoir des propositions préfabriquées, mais pour poser ses propres termes de référence, issus de sa trajectoire, de ses intérêts et de ses responsabilités. Il doit réaffirmer sans ambiguïté sa solidarité historique avec la cause palestinienne, non par posture idéologique, mais au nom des principes de justice internationale et d’équilibre diplomatique. Accepter même tacitement un plan de « relocalisation » ou un abandon progressif du droit au retour des Palestiniens serait une rupture grave avec cette tradition, et provoquerait un profond rejet populaire au Sénégal comme dans le monde musulman. Ce sommet avec Donald Trump est donc à la fois un risque et une opportunité.
Le Président Bassirou Diomaye Faye a quitté Dakar ce mardi matin à destination des États-Unis, sur invitation de son homologue américain.
Sources : farafinanews