Après le lancement du référentiel « Sénégal vision 2050 » par le Président de la République ce lundi 14 octobre 2024, Lii Quotidien a donné la parole aux économistes Alla Sène Gueye et Meïssa Babou pour recueillir leur avis sur le nouveau document des politiques publiques.
Par Massaër DIA
« L’autre chose, c’est que le document n’est pas le fruit d’un dialogue, c’est un document qu’on nous a donné alors que ce qu’on a besoin, c’est de dialoguer. Le PAP 1, c’est Makensi qui l’avait écrit, son approche, c’est pour dire quelles sont les approches du pays en oubliant les contraintes. Mais quand tu veux optimiser, capter les potentiels d’un pays mais tu n’arrives pas à régler les contraintes mais tu n’auras rien du tout, c’est ce qui s’est passé avec le PAP 1 », a souligné M. Alla Sène Gueye.
Selon l’économiste, le PAP 2 a été fait avec la direction du Plan qui a sorti des contraintes et sur la base des contraintes qui ont été évaluées, ils vont essayer de faire quelque chose, des projets et programmes pour lever les contraintes. Il a tenu à préciser que le document présenté, le terme reforme systématique est disproportionné par rapport aux résultats qu’on a présentés. « Une transformation systémique, c’est une transformation du système jusqu’à la racine mais on apprécie la transformation systémique par rapport aux effets nouveaux crées et qu’est-ce qu’on appelle effets nouveaux, il faut ça aboutisse à des résultats qui sont différents par rapport à ce qu’on avait avant », dit-il.
Poursuivant L’économiste affirme : « Et quand tu regardes Macky Sall pendant 10 ans, 2014 à 2023, on nous a livré 5,4% de croissance et ça, c’était sans le pétrole et sans une industrialisation, eux (les nouveaux gouvernants), ils disent qu’on va industrialiser nos ressources naturelles et on est un pays gazier et pétrolier et tu veux nous sortir 6 et à 7%, ce n’est pas agréable à entendre ».
Selon M. Alla Sène Gueye, il ne faut pas confondre filière et branche d’activités parce que l’ANSD travaille en branche d’activités pas en filière. Et les nouveaux gouvernants disent filière, filière mais une filière, ça commence par quelque part, ça finit par quelque part.
« Si tu veux dire par exemple la filière « Habillement », on sait que ça part depuis le coton, depuis le cuivre, la peau et ça finit à des habits, à des chaussures », dira-t-il.
Il estime qu’on n’avait pas développé les régions et Macky Sall avait dit qu’il allait faire 10 métropoles d’équilibre mais il ne l’a pas fait mais les nouveaux gouvernants l’ont mis en exergue pour dire aménagement et décentralisation et c’est une bonne chose mais là, où il y a problème, ce n’est pas le fruit d’un dialogue. Selon lui, les nouveaux gouvernants disent qu’ils veulent un Sénégal souverain et ils veulent beaucoup plus aller sur les marchés monétaires, mais aller sur le marché monétaire, ce n’est pas comme ça, on ne peut pas être un pays déficitaire dans sa balance commerciale, qui a besoin de devises mais les devises, il faut qu’ils aillent les emprunter et on ne peut pas emprunter en monnaie locale.
« Si tu empruntes en monnaie locale, comment tu vas régler tes factures d’importations. Parce que rien que les hydrocarbures, elles prennent 60% des recettes en devises », souligne M. Alla Sène Gueye.
Il rajoute : « L’électricité, ils nous disent que, il faut qu’on attende 2050 pour avoir l’électricité à 60 F alors que la Côte d’ivoire déjà un tarif de 64 F actuellement. Comment, nous, la côte d’ivoire a un tarif moyen journalier de 64 F et nous, on va attendre 2050 pour avoir l’électricité à 60 F, ça ne tient pas la route ».
L’économiste souligne que les nouveaux gouvernants veulent multiplier le PIB par habitant par 3 pendant 25 ans mais ce n’est pas ambitieux. Et il faut ça soit ambitieux pour qu’on puisse faire, on a le pétrole, on a le gaz, il faut qu’on puisse multiplier le PIB par habitant par 5 ou par 6.
Actuellement, tu as un PIB par habitant de la moyenne mondiale de 12 dollars par tête d’habitant, la moyenne mondiale est à 12 000 F et toi, tu es à 1500, comment tu vas faire ? Mais si tu le triples, tu as 4500 mais, tu n’es même pas à la moitié de la moyenne mondiale », dira l’économiste.
MEÏSSA BABOU, ECONOMISTE : « Ce qu’on a fait c’est à partir du PSE »
Selon l’économiste, Meïssa Babou, le référentiel « Sénégal vision 2050 », c’est ce le nouveau régime compte faire sur les 50 ans. C’est un document qui a été partagé pour dire aussi bien aux concitoyens et aux partenaires du Sénégal là où on veut mener le Sénégal à partir de 2025.
« Il s’agit ici de comprendre que ce référentiel n’a été écrit Ex nihilo, c’est à dire quelqu’un qui ne connait pas le PSE, même pas le Sénégal, on lui demande de nous développer le Sénégal, on commence par dire voilà ce qu’il doit faire aménagement du territoire, les instructions non. Ce qu’on a faite c’est à partir du PSE, on a fait le diagnostic du PSE, on a regardé les manquements et on a corrigé, ça, c’est le premier jalon », dixit M. Babou.
Il poursuit : « C’est un programme, c’est vrai comme tous les programmes en ont une ambition mais attention ça ne suffit jamais, une ambition doit être accompagnée forcément par des moyens parce qu’en stratégie si vous n’avez pas les moyens de votre stratégie, c’est loupé et donc une ambition qui doit être en harmonie avec les moyens, en harmonie avec les problématiques de l’heure et déclinée sur des générations ».
Il rajoute : « Le deuxième jalon, corriger ne suffit pas, on a amélioré en mettant une idée novatrice comme le point 2 sur l’aménagement du territoire, le PSE n’était pas aussi fort que ça dans ce domaine-là et même le pont 4 avec l’apport et la compétitivité des entreprises nationales, je crois que le PSE n’était pas allé très loin ».
Selon l’économiste, on a regardé les échecs dans des points positifs du PSE et on a repris ces points là comme la gouvernance, le PSE l’avait, le capital humain, le PSE l’avait. Selon l’économiste, ce qu’on a présenté est très riche et il y a des innovations majeures avec les pôles, avec la participation de l’entreprise privée.
« Donc le problème, à mon avis se situe non pas dans l’élaboration d’un programme mais beaucoup plus dans la gestion. Et la gestion, ce sont des hommes qui vont porter ce projet et qui vont le conduire », dira M. Babou.