Mamadou Badio Camara n’arbitrera pas cette fois le différend entre le pouvoir et l’opposition sur la question de la loi interprétative de l’amnistie. Le président du Conseil constitutionnel est décédé ce jeudi 10 avril 2025 à Dakar, à l’âge de 73 ans.
Par Dieynaba TANDIANG
Il aura vécu assez pour ramener la sérénité au Sénégal après un moment trouble et une grande certitude dans la vie politique du pays. En effet, président du Conseil Constitutionnel, il a eu le courage, soutenue par ses pairs de la haute juridiction, de tenir tête au Président Macky Sall qui avait décidé de reporter l’élection présidentielle de février 2024. Dans un grand moment de doute, il sauve la démocratie en instaurant l’ordre constitutionnel. A la tête de l’institution depuis 2022, il inscrit ainsi son nom dans l’histoire de la démocratie sénégalaise.
Né en 1952 à Dakar, il a gravi tous les échelons de la justice. Le magistrat est diplômé de l’Ecole nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM) en 1977, section Magistrature. Il devient successivement, dans les tribunaux de grande instance : substitut du procureur, premier substitut au parquet de Dakar (1977 à 1984), Procureur de la République à Kaolack puis à Ziguinchor (1984 à 1991). De 1991 à 1993, il est substitut général à la cour d’appel de Dakar, de 1993 à 1998, procureur-adjoint à Dakar, de 1998 à 2008 à la Cour de cassation il est désigné conseiller puis secrétaire général de 2008 à 2022, il est affecté à la Cour suprême (née de la fusion du Conseil d’Etat et de la Cour de cassation), avant d’être nommé président du Conseil constitutionnel en 2022, dans un contexte politique déjà tendu.
Mamadou Badio Camara fut expert des Nations-Unies, membre de la commission d’enquête sur la situation des prisonniers politiques au Burundi (Bujumbura, 1999 2000), expert de l’OIF, dans le cadre du projet Justice, Haïti (Port-au-Prince,2006-2009), a ancien vice-président du Comité des Nations-Unies contre les Disparitions forcées (Genève, 2011-2015) et Vice-président de l’AHJUCAF.
Cet éminent magistrat, ancien chef de la Cour suprême, était jusque-là resté discret. Mais il était sorti de l’ombre il y a un an, devenant presque une figure publique en arbitrant une crise politique inédite. Le président Macky Sall avait alors annoncé un report sine die de la présidentielle, invoquant des irrégularités dans le processus de sélection des candidats. Mais le Conseil constitutionnel, consulté par l’exécutif, s’est prononcé contre ce report. Une décision historique qui a contraint les autorités à organiser l’élection avant la fin du mandat de Macky Sall, le 2 avril. Il installera le nouveau Président élu dans ses fonctions le 2 avril 2024.
Il atteint ainsi l’apogée de sa carrière en redorant le blason de la justice que les hommes politiques avait finit par tenir. Il inscrit ainsi son nom en lettre d’or dans l’histoire de la magistrature au Sénégal. Il par ainsi, dans le monde des justes avec le sentiment du devoir accompli.
Mamadou Badio Camara sera inhumé ce vendredi aux cimetières musulmans de Yoff.
La rédaction de Lii quotidien présente ses condoléances à la grande famille de la justice et à la famille éplorée.




