La cérémonie officielle de la 38ème édition de la Semaine nationale de sensibilisation et de mobilisation contre les drogues prévue du 24 au 29 juin 2025, et organisée par le Cild, a été lancée hier au Centre Jacques Chirac de Thiaroye. Axée sur le thème : « La prévention de l’usage de drogues en milieu scolaire : Une approche inclusive et participative pour préserver l’avenir de la jeunesse sénégalaise », a pour objectif de renforcer les efforts de sensibilisation et de prévention chez les jeunes et les communautés les plus exposées.
Par Idrissa NIASSY
Le rapport mondial de l’Onudc sur les drogues qui sera lancé le 26 juin 2025, est préoccupant. Selon Kameldy Neldjingaye, Directeur de l’Afrique de l’Ouest et du Centre de l’Onudc, le cannabis plus connu sous le nom de «Yamba» au Sénégal demeure la substance la plus utilisée dans la région, avec une prévalence annuelle d’environ 10 % parmi la population âgée de 15 à 64 ans. Il indique une tendance inquiétante qui est l’émergence de mélanges de drogues très nocifs, comme le kush, qui pourrait contenir des opioïdes très puissants du groupe des nitazènes. Selon l’enquête, le kush, apparu en Sierra Leone, s’est rapidement propagé dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, dont la Libéria, Gambie, Guinée, Guinée-Bissau et Sénégal.
Mais en raison de ses effets dévastateurs, la Sierra Leone et le Libéria ont déclaré l’état d’urgence sanitaire. Le rapport montre qu’en Guinée, une enquête en milieu scolaire a révélé que près de 1 % des élèves âgés avaient déjà consomme du kush, faisant de cette substance la troisième drogue utilisée par les 15-18 ans derrière le cannabis et les inhalants. Le document démontre, selon lui, que l’Afrique de l’Ouest est devenue une zone de transit et de consommation croissante pour la cocaïne. « Les cas de décès de cocaïne liés à l’Afrique ont augmenté de 48 % par rapport à l’année précédente et les données de traitement suggèrent une hausse généralisée de l’usage », a-t-il déclaré.
« L’usage non médical du tramadol demeure largement répandu », ajoute-t-il lors de la cérémonie officielle de lancement de la 38ème édition de la Semaine de mobilisation et de sensibilisation contre les drogues prévue du 24 au 29 juin 2025, au du Centre de sensibilisation et d’information sur les drogues Jacques Chirac, sous le thème : « La prévention de l’usage des drogues en milieu scolaire : Une approche inclusive et participative pour préserver l’avenir de la jeunesse sénégalaise ». Cet événement organisé par le Comité interministériel de lutte contre la drogue (Cild) basé au ministère de l’Intérieur, vise à mettre en lumière les réalités locales, tout en mettant en exergue les efforts nationaux dans un esprit de coopération renforcée.
77 % des quantités mondiales d’opioïdes pharmaceutiques saisies en Afrique
Le rapport indique également que 77 % des quantités mondiales d’opioïdes pharmaceutiques sont saisies en Afrique entre 2019 et 2023. Alors que seulement 3,4 % des personnes ayant des troubles liés à l’usage de drogues en Afrique bénéficient d’un traitement. « Sans investissements urgents et durables, les conséquences des troubles liés à la consommation de drogues non traitées, y compris l’aggravation des risques pour la santé, les dommages sociaux et la pression sur les services publics ne feront que s’intensifier », alerte M. Neldjingaye.
Le rapport insiste aussi sur la nécessité de renforcer les interventions efficaces fondées sur des données probantes et des principes de santé publique. Sur le plan sécuritaire, le rapport montre qu’il ne suffit pas de multiplier les saisies, mais d’assurer le suivi judiciaire, tout en renforçant la coopération internationale, le partage d’informations et les opérations conjointes. Parce que, précise-t-il, «les saisies de drogues doivent être suivies d’actions judiciaires afin de démanteler les réseaux criminels plutôt que de simplement déplacer les routes de trafic ».
Le rapport recommande également de renforcer les capacités des services chargés de l’application de la loi, notamment en matière d’équipement, d’analyse scientifique, de criminalistique et de coopération transfrontalière, et de cibler les maillons stratégiques des réseaux criminels. Il attire également l’attention sur le rôle critique des ports et des routes maritimes pour renforcer les contrôles en mer et dans les ports présentés comme un levier essentiel pour interrompre les chaînes d’approvisionnement. Pour le Sénégal, les choses sont en train de bouger dans la lutte contre la consommation de drogue en milieu scolaire.
200 enseignants formés pour servir de relais au niveau de l’école
Au Sénégal, le ministère de l’Éducation nationale, à travers la division du contrôle médical et scolaire, a entamé depuis plusieurs années un processus d’intégration de la prévention contre la consommation de la drogue en milieu scolaire à travers un module qui sera intégré dans le curricula de l’enseignement. Ce qui a permis la formation d’environ 200 enseignants pour pouvoir servir de relais au niveau de l’école. Ce processus entamé depuis un certain temps, a permis de mener plusieurs activités de prévention au niveau des écoles.
Selon Cheikh Diop, Coordonnateur du Centre Jacques Chirac, beaucoup d’écoles du public et du privé ont déjà reçu les responsables dudit Centre de sensibilisation et d’information sur les drogues pour qu’ils puissent non seulement parler aux élèves, mais développer des chances de sensibilisation afin de les protéger contre la drogue qui a fini véritablement d’affecter l’espace scolaire. « Aujourd’hui, nous avons un grand défi, parce que de plus en plus, on constate de façon régulée que des jeunes consomment des drogues qui ne sont pas totalement maîtrisées, c’est ce qu’on appelle les nouvelles substances rétroactives », a-t-il signalé.
«L’autre défi c’est de renforcer la prévention, la protection, de renforcer l’éducation pour que les jeunes ne touchent pas à la drogue», ajoute-t-il. Le Coordonnateur du Centre Jacques Chirac a profité de cette occasion pour inviter les autorités étatiques à renforcer davantage la prévention qui est devenue le maillon faible du système, mais aussi à soutenir le Cepiad logé au niveau du Chnu de Fann et l’hôpital psychiatrique de Thiaroye. «Nous avons de beaux résultats dans le domaine de la répression, en témoigne des saisies importantes qu’on a enregistrées l’année dernière. On a également des résultats au niveau de la prise en charge», a-t-il fait valoir.
Centre Jacques Chirac, une marque de reconnaissance
Venu présider la cérémonie de lancement officielle de la Semaine nationale de sensibilisation et de mobilisation contre les drogues, le Secrétaire général du ministère de l’Intérieur, Cheikh Niang, a fait savoir que le Centre de sensibilisation et d’information sur les drogues Jacques Chirac est « une marque de reconnaissance » pour tous les efforts déployés quotidiennement et inlassablement par ces acteurs communautaires pour l’éradication de la drogue. « Aujourd’hui, plus que jamais, le gouvernement du Sénégal réaffirme son engagement à combattre ce fléau sous toutes ses formes en misant particulièrement sur la prévention, l’éducation et la mobilisation communautaire », a-t-il déclaré.
Mais, ajoute-t-il, « la prévention, notamment en milieu scolaire, est la meilleure barrière contre l’entrée dans la spirale de la toxicomanie ». Pour lui, trois piliers fondamentaux ont été mis en place pour contrecarrer ce fléau. Il s’agit d’abord, d’informer et de sensibiliser les jeunes en leur donnant les outils indispensables pour reconnaître les dangers et faire les bons choix ; de renforcer les capacités des encadreurs et des acteurs de proximité pour qu’ils puissent détecter de manière précoce les signaux faibles et intervenir à temps ; enfin, de créer un environnement scolaire sûr et protecteur à travers des politiques concertées et des partenariats solides et salvateurs.
Cette semaine nationale sera marquée par des campagnes de sensibilisation, des rencontres pédagogiques, des caravanes, des ateliers de formation, des témoignages et des opérations d’incinération de drogue.