A la suite du limogeage sans ménagement de Choguel Maïga pour avoir critiqué la transition et exigé une plus grande clarté sur le retour à un ordre constitutionnel, la junte a décidé de durcir l’appareil du régime. En effet, par décret du 21 novembre, Assimi Goïta a nommé son très proche collaborateur, le général Abdoulaye Maïga au poste de Premier ministre. Les putschistes maliens ont montré avec la mise à l’écart de Choguel Maïga qu’ils goûtent très peu aux attitudes et discours velléitaires et aux interrogations sur la fin de la transition.
Par Salif Sow
Depuis 2021, la junte des colonels devenus tous généraux, dirige d’une main de fer le Mali et ferme tous les espaces de respiration démocratique. Elle a suspendu les partis politiques, arrêté des dizaines d’hommes politiques et de militants de la société civile et ouvert le pays aux mercenaires russes de Wagner, après avoir rompu avec la France et d’une manière générale avec les pays occidentaux jadis partenaires de premier plan de Bamako. Sur fonds d’accusations de déstabilisation, de soutien aux terroristes, la junte déroule un agenda autoritaire. Pendant ce temps, les attaques terroristes se poursuivent, générant des pertes en vies humaines, militaires et civiles. Récemment, une attaque terroriste a pris pour cible l’aéroport de Bamako et fait environ une soixantaine de morts. La junte s’enferme dans de la propagande, aidée en cela par son allié russe, si elle ne s’emmure pas dans un silence éloquent.
Les Maliens, lassés par 4 années de dictature militaire, voient la nomination de Abdoulaye Maïga, ancien porte-parole du gouvernement et porte-étendard de la propagande du régime, comme une nouvelle preuve de l’enfermement du régime sur lui-même. En effet, Choguel Maïga, même s’il est comptable du bilan du régime Goïta, incarnait tout de même une voix civile dans une junte militaire. Son éviction et son remplacement par Abdoulaye Maïga, passé récemment de colonel à général par la grâce d’un décret présidentiel, est un signal clair sur la volonté de Bamako de poursuivre la mise en œuvre d’un agenda autoritaire.
L’essentiel des postes d’envergure sont aux mains des soldats au Mali. La junte malienne prend désormais en main toutes les commandes du pays. La présidence de la République, la présidence de l’organe législatif (CNT) et le poste de Premier ministre sont tous occupés par des militaires terrés à Bamako, loin du front où les rebelles du CMA et les terroristes islamistes poursuivent leurs offensives meurtrières.
Désormais, quelle sera la destination de l’ancien Premier ministre Choguel Maïga, ex-pilier civil de la junte ? Pour rappel, c’est ce dernier qui avait traité le Sénégal de démocratie théorique » devant le Premier ministre Ousmane Sonko. Un observateur averti de la scène politique malienne prédit deux fins à Choguel : l’exil ou la prison. Compte tenu de la nature autoritaire du régime membre de l’AES, rien ne serait surprenant. Déjà, deux de ses partisans, Boubacar Traoré et Abdelkader Maïga, purgent actuellement des peines de prison pour avoir émis des critiques contre la junte.