EDITO : Unis contre la République
Les raisons fournies par les pourfendeurs du report de la Présidentielle suscitent des interrogations.
Elles semblent très réductrices et simplistes pour convaincre sur le rejet par une partie de l’opposition de l’abrogation du décret 2023-2283.
En effet, quel chef d’Etat prendrait le risque de se mettre à dos une bonne partie de l’opinion nationale et des responsables de son propre camp pour prolonger de 10 mois son mandat ?
Par Babacar DIONE
Les arguments de l’opposition et de la société civile politique, unies dans ce combat, sont difficilement convaincantes.
Même si elles bénéficient, il faut le reconnaitre, d’un préjugé favorable auprès de beaucoup de Sénégalais. Et ça se comprend !
Il y a juste quelques semaines le débat sur la probabilité d’une troisième candidature du président Macky Sall avait été agité par ces mêmes acteurs de l’opposition et de la société civile politique avant que le chef de l’Etat n’annonce qu’il ne se représenterait pas. Ils ne se sont pas avoués vaincus.
En remettant ce débat sur la sellette, ils veulent prouver à l’opinion nationale et internationale que le président Macky Sall n’a pas encore tout à fait sorti de son esprit l’idée d’un troisième mandat. Et qu’ils avaient raison d’avoir farouchement exprimé leur opposition. Ils pensent également, pouvoir plus facilement remobiliser les troupes déjà formatées dans la lutte contre une troisième candidature de Macky Sall.
Calculs politiciens
C’est donc en toute logique qu’ils évitent d’utiliser le terme report dans leur argumentaire, ou même de «dérogation» telle que mentionné dans la proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale. Mais insistent davantage sur une volonté de prolongation du mandat du chef de l’Etat.
Pour ces contempteurs du report, la fin justifie les moyens. Quelque soit ce que cela peut coûter de fragiliser nos institutions et de mettre le pays dans le chaos.
On peut certes émettre des doutes quant à la crise institutionnelle que Macky Sall nous a « vendue » pour abroger le décret de convocation du collège électoral. En effet, la procédure n’en est qu’à ses balbutiements, aucun juge n’a encore été convoqué par la commission d’enquête parlementaire pour qu’on puisse parler de crise institutionnelle.
Situation alarmante
Cependant, les soupçons de corruption et de conflits d’intérêt qui pèsent sur des membres du Conseil constitutionnel n’exigent-ils pas qu’on s’arrête pour chercher la vérité ? Sans une enquête froidement menée, on donne libre cours à toutes les supputations et versions imaginables. Le Premier ministre Amadou Ba n’a pu d’ailleurs s’empêcher de faire une sortie dans la presse internationale pour se blanchir. Après qu’un juge constitutionnel a jugé opportun de porter plainte contre X. Cette situation n’est-elle pas assez alarmante ? Doit-on poursuivre le processus en semant déjà les germes de contestations post électorales ?
D’autant plus que la demande de report de la Présidentielle est une volonté exprimée par de nombreux candidats de l’opposition. Beaucoup plus que ceux qui s’opposent aujourd’hui à son report. Ils ont tous récemment souhaité l’arrêt du processus électoral donc, le report du scrutin et, en ont fait part au chef de l’Etat.
Mais au Sénégal, les hommes politiques ne se gênent pas d’avoir deux positions contraires sur un même sujet.
Boubacar Camara, Mimi Touré, Abdourahmane Diouf… et tous les membres de la délégation reçue par le chef de l’Etat étaient des partisans du report bien avant que les députés du Parti démocratique sénégalais (Pds) ne déposent leur proposition de loi.
Par ailleurs, des recours ont été déposés afin de faire invalider la « dérogation » demandée par les députés. Pourquoi, dès lors mettre en péril la vie de Sénégalais en appelant à des manifestations toutes émaillées de violences, y comprises celles autorisées ?
Les initiateurs de ces manifestations sont les seuls responsables de telles dégénérations et devront en payer le prix.
Du côté des autorités, l’appel au dialogue devrait suivre son cours jusqu’au terme de la rencontre. Des actes d’apaisement, comme celui ayant abouti au rétablissement du signal de Walf Tv, doivent également continuer à être posés.
L’objectif principal devant être pour tous, le retour à un processus électoral fiable et la tenue d’une élection libre et transparente.
Babacar DIONE