AUDIENCE SUR LA DECLASSIFICATION DE 826 HA DE LA BANDE DES FILAOS, CE JEUDI : Mamadou Lamine Diagne, Directeur exécutif de l’AJE s’attend à un verdict favorable
L’Action pour la justice environnementale (Aje) espère obtenir gain de cause dans son combat pour l’annulation du décret portant déclassement de 826 hectares de la bande des filaos.
Par Ousmane THIANE
La Cour suprême examine, ce jeudi 25 avril, le recours en annulation visant le décret portant déclassification de 826 ha de la bande des filaos déposée par l’Action pour la Justice Environnementale (AJE). La plaignante est confiante quant à l’issue de ce dossier. « Nous avons espoir parce que, cette fois-ci, on a quand même soulevé les engagements du Sénégal sur le plan international ; à savoir les accords de Paris. On a aussi soulevé la Convention sur la désertification à laquelle le Sénégal est partie ainsi que l’essentiel des instruments juridiques pertinents interdisant formellement la remise en cause des espaces qui peuvent servir de puits de carbone, de réservoir de biodiversité et de barrage contre l’avancée de la mer. Ces moyens n’ont pas été soulevés dans le précédent procès. Le juge n’avait pas l’occasion de statuer sur ces questions de droit international de l’environnement mais cette fois- ci, les allégations soutenues par la nécessité de prendre en compte la crise climatique pourraient peut-être influencer le juge à reconsidérer sa jurisprudence sur cette question en opérant un revirement jurisprudentielle historique en faveur de l’environnement », déclare le Directeur exécutif de l’AJE, Mamadou Lamine Diagne.
Notre interlocuteur se dit confiant que, sur la base des éléments qu’ils ont mis sur la table de la Cour suprême, ladite juridiction va trancher en leur faveur et annuler le décret signé le 5 avril 2023 par l’ex-président Macky Sall.
« Nous sommes confiants d’autant plus que dans le premier jugement le juge avait déjà déverrouillé le Code de l’Environnement qui nous soumettait à l’obtention d’un agrément avant d’ester en justice. Le juge avait déjà estimé que ce verrou n’est pas pertinent car AJE est reconnue en tant qu’association spécialisée pour la protection de l’environnement. Par conséquent, il statue au fond et ensuite il n’avait pas carrément rejeté l’article L48 du Code de l’Environnement qui exige une évaluation environnementale avant tout procès. Mais, il avait estimé que le déclassement c’est une simple question de procédure, l’acte du déclassement ne nécessite pas une évaluation.
Nous, cette fois-ci, on lui a démontré que c’est un Plan d’Urbanisme de Détail (PUD) qui a motivé le déclassement et ledit plan invite l’autorité à mettre en place des projets suite à l’avis de la Commission Nationale de Conservation des Sols. Ce qui fait que normalement, il devait y avoir au préalable, une évaluation environnementale avant tout déclassement et l’avis favorable de ladite commission.
L’autre fois, il (le juge, ndlr) n’avait pas pris en compte tous ces aspects. D’ailleurs, il fondait plus son argumentaire sur le code de l’urbanisme. Ceci n’étant point pertinent pour trancher le cas soulevé devant lui, on est revenu à la charge et peut-être qu’il va reconsidérer sa vision des choses et entrer définitivement dans le panthéon des juges protecteurs de l’environnement », a-t-il avancé répondant à l’argumentaire de l’agent judiciaire de l’Etat qui soutient que le récépissé du ministère de l’Intérieur ne donne aucun droit à l’Action pour la justice environnementale. « Il résulte de cette disposition qu’une Association de défense de l’environnement ne peut ester en justice sans, au préalable, bénéficier d’un agrément délivré par l’Etat, en l’occurrence le ministère de l’Environnement», mentionnait la défense de l’Etat dans la requête de l’irrecevabilité de la demande de la requête l’AJE.
Le Président Bassirou Diomaye Faye invité à abroger les décrets portant déclassement de la bande de filaos
Le directeur exécutif de l’Action pour la justice environnementale (Aje) invite par ailleurs, le président Bassirou Diomaye Faye à abroger l’ensemble des décrets pris par son prédécesseur Macky Sall déclassifiant la bande de filaos de 2018 à nos jours. «Que le juge nous donne gain de cause ou non, aujourd’hui, l’autorité, à savoir le Président de la République peut prendre un décret abrogeant l’ensemble des décrets portant déclassement de la bande des filaos. Je pense que c’est une question de volonté politique. Le jugement est juste symbolique mais, si on veut restaurer la bande des filaos, c’est à travers un simple décret abrogeant l’ensemble des décrets pour qu’elle soit aujourd’hui restaurée et remise en état. C’est l’appel que nous lançons au Président Bassirou Diomaye Faye », dira-t-il.
L’association de sauvegarde des intérêts écologiques des communautés par le biais de leur autonomisation juridique demande, en outre, l’adoption sans délais de la loi sur le littoral, l'audit de la bande des filaos de 2018 à 2024 mais également la mise en place d’un schéma de restauration naturelle assistée et inclusive.