COUR DES COMPTES/PRODAC : Les détails accablant la gestion de Mame Mbaye Niang
La Cour des comptes a publié le mardi dernier son site ses rapports définitifs 2021, 22 et 23. Concernant le Programme des domaines agricoles communautaires (Prodac) pour la période 2018-2021, la Cour a mis en lumière plusieurs irrégularités et implications financières.
Par Idrissa NIASSY
Plusieurs irrégularités et implications financières ont été mises en lumières par le rapport définitif publié le mardi dernier 30 avril 2024, par la Cour des comptes concernant la gestion du Programme des Domaines Agricoles Communautaires(Prodac)surson site pour la période 2018-2021.
Ce programme, conçu pour stimuler l’entrepreneuriat agricole chez les jeunes au Sénégal, s’est retrouvé au cœur d’une controverse liée à des accusations de mauvaise gestion financière sous l’égide de Mame Mbaye Niang, alors ministre de la Jeunesse. Il avait prévu un budget de 100 milliards F Cfa sur cinq (5) ans pour le développement agricole.
Cependant, des audits ont révélé des anomalies significatives dans les dépenses et les approches de financement avec une série d’irrégularités dans la gestion des fonds. Mame Mbaye Niang, en tant que ministre de la Jeunesse, est apparu comme un acteur clé dans la signature d’un contrat controversé avec l’entreprise israélienne Green 2000.
Ce contrat, évalué à 29,6 milliards F Cfa pour la première phase et augmenté de 59,5 milliards F Cfa pour la deuxième phase, en tout 89 milliards F Cfa, a été financé par la Banque islamique de développement (Bid). Les modalités de ce contrat ont été critiquées pour leur manque de transparence et des accusations de passation irrégulière
Partenariat Sénégal-Green 2000
Le partenariat entre l’État sénégalais et Green 2000, une société de construction israélienne, a été formalisé le 28 août 2015 pour développer les Domaines agricoles communautaires (Dac) dans diverses régions du Sénégal, à savoir: Séfa, Itato, Keur Samba Kane et Keur Momar Sarr.
Mame Mbaye Niang, en sa qualité de ministre de la Jeunesse et Daniel Pinhassi, représentant Rafael Dayan, Directeur général de Green 2000, ont signé ce contrat. L’approbation fut ensuite donnée par Birima Mangara, ministre délégué Chargé du Budget, le 21 septembre 2015.
La première phase du projet a été financée par l’État du Sénégal avec une enveloppe de 29,6 milliards F Cfa, grâce à une convention de financement avec Locafrique, un établissement financier local. Suite à cela, une deuxième phase a été lancée avec un financement de 59,5 milliards F Cfa par la Banque islamique de développement pour étendre le projet à d’autres Dac, notamment Niombato, Dodji, Fafacourou, et Boulel. Cependant, le projet a été entaché par des critiques concernant sa gestion.
Le rapport de la Cour des Comptes a révélé que l’attribution du marché à Green 2000 s’est faite par entente directe, ce qui a soulevé des inquiétudes sur la transparence et la légitimité du processus. De plus, le manque de détails sur les critères de sélection de l’entreprise a alimenté des accusations de favoritisme. Le rapport a également mis en exergue des problèmes relatifs à l’exécution du projet ; notamment des retards et des défauts dans la livraison des infrastructures, questionnant la qualité des travaux réalisés.
Des dépassements de coûts inexpliqués
Le rapport définitif de la Cour des comptes a aussi pointé du doigt des dépassements de coûts inexpliqués et des paiements effectués sans les bases légales requises, y compris des compensations irrégulières à des membres de commissions des marchés.
Ainsi, des paiements qui ne reposaient pas sur des documents justificatifs adéquats ou qui étaient en désaccord avec les accords de financement préétablis ont été dévoilés par le document. Ces transactions incluaient des paiements importants sans explications claires ou en contradiction avec les procédures normatives.
D’autres problèmes spécifiques ont également été notés concernant les indemnisations versées aux membres des commissions des marchés. Ces paiements ont été effectués sans aucune base légale ou réglementaire, ce qui soulève des doutes sur leur légitimité et leur conformité avec les normes de gestion financière publique.
Pour finir, le rapport définitif a fait savoir que d’autres anomalies ont été observées dans les contrats de construction attribués pour les Domaines agricoles communautaires où des paiements ont été effectués pour des travaux non terminés ou mal exécutés, sans justifications nécessaires ou en contravention avec les termes contractuels.
Les résultats des audits ont déclenché une série d’actions légales. Bien que Mame Mbaye Niang ait contesté toute implication dans ces irrégularités, les enquêtes ultérieures continuent de dévoiler des gestions défaillantes des fonds publics sous sa supervision.
Problème de l’adéquation profil/poste
En matière de gestion des ressources humaines, la bonne pratique recommande de recruter en tenant compte des qualifications et exigences requises pour occuper des postes donnés. Ce qui n’est pas le cas concernant le recrutement de certains agents dans les Dac. L’examen des profils de certains agents a permis de révéler que par rapport à la fonction exercée se pose le problème de l’adéquation profil/poste. Car, certains agents sont affectés à des postes non adaptés à leurs profils, comme le chargé de suivi évaluation où un journaliste a été désigné pour occuper ce poste, ainsi que le poste de chargée de la promotion de l’entreprenariat où une fille ayant un DUEL II en anglais a été recrutée.
D’autres agents affectés à des postes non adaptés à leurs profils ont également été cités tels que le chef de Dac qui a un diplôme de master II en citoyenneté Droit de l’homme et action humanitaire, adjoint au chef de Dac occupé par un instituteur. Pour le poste de chargé de mobilisation, un poste désigné pour quelqu’un qui n’a pas de diplômes, s’est retrouvé entre les mains d’un lutteur.
Pour certains postes, comme le chef de Dac, la connaissance de la matière agronomique constitue un atout en raison de la spécificité de l’activité pratiquée.